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D​é​noyé

by Serge Viau

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    Spoken Shit & Autres Vieux Trucs
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1.
dans la chambre molle il neige du papier je suis l’homme qui danse nu triste et beau l’homme grave et fol dans la chambre de papier pour rien
2.
Chose 03:00
on ne parle jamais de lui il se couche avant minuit c’est une sorte de sans destin son vieux chien vit chez le voisin son père oublie toujours son nom même les putains lui disent non il est plongeur au restaurant de la piscine depuis dix ans comment vouloir être quelqu’un quand on porte des souliers bruns c’est un homme de peu de doute une mine de rien sous sa croûte il ne voit que ce qu’il regarde il n’a jamais lu Kierkegaard sa vie est sur la liste d’attente il reste chez lui quand il vente pour lui le pire est déjà mieux son but est de devenir vieux comment vouloir être quelqu’un quand on porte des souliers bruns
3.
je suis une femme certains soirs j’ai l’œil bleu et j’ai l’œil noir je suis aux parfums aux oiseaux aux bijoux une rose à mon cou me tient au chaud et des musiques aux accents tristes règlent mes cycles sur la piste où j’habille ma face de crème mon corps de crêpe et mes yeux de problèmes les soirs où je danse des valses étranges en silence je suis un hibou en plein jour j’ai l’œil aveugle et le souffle court je cherche mon nid je cherche mon trou je dors dans un chou loin de la vie et des sorcières aux ongles sales jouent dans mes nerfs des reels sauvages avec de grandes aiguilles des reels acides comme des filles les soirs où j’habille ma crasse et mes gales de guenilles je suis un vieux clown en chômage je chie des mouches dans ma cage j’achète des bouteilles je paye pour me souvenir je mendie mon avenir où tout sera pareil et les journaux annoncent ma mort toujours trop tôt même en retard
4.
Lola 03:02
elle a la tête d’un ange cruel la bouche d’une bête elle sait qu’elle est belle et quand elle bouge le bout de ses ailes l’air devient rouge tout autour d’elle j’aime ses mains j’aime son teint mais j’aime surtout ses seins elle a une paire de dés au creux de sa main une bouteille de brandy dans son sac à main elle a un vieux poudrier comme ange gardien elle est bien protégée ses cheveux sont teints j’aime son crin j’aime son drain mais j’aime surtout ses seins elle a de tout petits pieds une montre brisée une chatte bouclée une mère névrosée un tout petit nez une lampe dorée une copine gaie un panier percé elle a l’air libérée sur parole seulement son temps est compté elle a déjà quinze ans et quand elle me trompe avec ses amants elle sait qu’elle se trompe et elle se repent j’aime son chien j’aime son serin mais j’aime surtout ses seins j’aime les nains j’aime les trains mais j’aime surtout ses seins
5.
t’as l’air d’avoir kèke chose qu’on sait pas quoi t’as l’air d’un optimiste qui s’ennuie t’as l’air d’un gynécologue qui trouve pu ça l’fun t’as l’air d’un matelas qui a pas dormi de la nuit t’as l’air d’un riche à millions qui a pas le téléphone t’as l’air d’une rue dans le mauvais sens t’as l’air d’un parapluie qui a peur de l’eau t’as l’air d’un chômeur qui a besoin de vacances t’as l’air d’un rond de poêle allumé à low t’as l’air d’une statue qui tient pas deboutte t’as l’air d’une chenille qui se cherche un chenil t’as l’air d’un vendeur qui sait pas comment ça coûte t’as l’air d’un poteau qui a perdu le fil t’as l’air d’un perroquet qui a pas compris le mot t’as l’air d’un monument à n’importe quoi t’as l’air d’un matelot qui se fait mener en bateau t’as l’air d’un mort qui aurait pas vraiment le choix t’as l’air d’une affaire qui a été changée de place t’as l’air d’un manchot à bout de bras t’as l’air d’une farce plate à Coco Le Casse t’as l’air d’un béluga dans un piège à rat t’as l’air d’un tableau de bord de l’autre bord t’as l’air d’un gars qui s’en souvient pas t’as l’air d’un Français dans le boutte de Val d’Or t’as l’air d’un tas de marde dans un vieux bas t’as l’air d’avoir kèke chose qu’on sait pas quoi t’as l’air d’avoir kèke chose qu’on sait pas pourquoi
6.
passager des années jaunes lépreux des heures momie d’ulcères lichen en croûte orphelin de Dieu blême sans fond avocat gauche suri à blanc boudin du tendre pantin de grabat miroir pour riens quand tu ne ris pas tu pues des pieds tu sens la mort et la vie te nuit quand tu ne meurs pas tu bandes à mort arbre à couilles ogre-grappe jubilant géant monstre vert écume quand tu ne bandes pas tu m’écris en manque de viols tu m’écris pour faire un malheur pour faire un malheur pour faire un malheur pour faire un malheur pour faire un malheur pour faire un malheur pour faire un malheur
7.
j’ai toujours aimé allumer un allumette j’ai toujours toujours toujours aimé me mette
8.
à tous les nègres blancs une boule et un écran une paire de souliers noirs une montre et un miroir à chacun sa poubelle sa pédale et sa pelle une ampoule une serviette une clé et une assiette à tous les nègres blancs un parapluie pliant du pain et des condoms un trône percé d’un rond un tout petit plancher une guenille à chiquer le transport des valises le droit à la bêtise à tous les nègres blancs des pieds pour leurs enfants une bouteille pleine de roches une lampe et une poche une corde et un piquet la culture du navet une toile de Taillibert l’adresse du cimetière une cirrhose une scie ronde le blé d’une fausse blonde un clou phosphorescent une brique et un aimant mo-ha ! mo-ha ! mo-ha ! (je n’ai jamais vu Wabush…) (je voudrais voir Wabush…)
9.
Ramon 03:06
j’étais Ramon le mal rasé ramonant la femelle dans un arbuste empoussiéré du parc Jeanne-Mance après le bar ses considérables totons blancs frémissaient au printemps de Montréal et les petits poils érectiles si tragiquement vulnérables si dérisoires de son trou du cul dans le vent quand j’ai vu en redressant la tête la noire baleine du Mont-Royal ce corps monstrueux gigantesque affalé dans la nuit cosmique ça m’a comme saisi ç’a été plus fort que moi je me suis senti monter une sorte de dégoût pour le doux entonnoir qui s’efforçait de me divertir il y avait nos râles risibles et le rire puissant silencieux indifférent de l’horloge broyant les espèces dans l’inanité de la machine Univers
10.
sorciers sorcières anges de chair ouvrez les portes de nos enfers réveillez les morts et les vivants la nuit est rouge comme notre sang raclez vos violons tordez nos nerfs que chantent nos chaînes et nos misères et nous danserons sur les genoux entre les étoiles et les égouts nous voulons luire au bal des poussières qu’on nous donne à boire de la lumière nous voulons l’amour comme les bêtes des femmes louves la fesse en fête nous voulons l’Irlande tout entière pour nous tout seuls et sans l’Angleterre nous n’aurons ni maîtres ni tabous entre les étoiles et les égouts qui sont ces fous qui crient dans le noir des ombres nues devant des miroirs nous vendrons le vent aux millionnaires dans des boîtes vides faites de fer nous donnerons l’argent aux revenants l’habit des banquiers aux chiens errants nous ferons fondre l’or pour en faire des chambres d’enfant sur toute la terre et nous bénirons ceux qu’on bafoue entre les étoiles et les égouts si les dieux sont morts les yeux crevés c’est qu’ils ont osé nous regarder refaire le monde ici-bas et puisque sans eux il n’y a pas de monde meilleur et pas d’ailleurs pour le plus grand de tous nos malheurs nous serons des hommes et c’est tout entre les étoiles et les égouts
11.
j’me sus faite frapper par l’ambulance je marchais à pied dans la distance je suis bad lucké dans l’existence c’pas ma faute à moé c’est mon enfance qui m’a toute fucké ça a pas d’sens pis mon père René y a pas d’licence y a pas l’droit d’chauffer un ambulance
12.
rente la sringue de l’amour dans mon cœur fais de moi le junkie du bonheur je suis seul c’est la nuit et je pleure rente la sringue de l’amour dans mon cœur hostie de tabarnak ça va mal maudit christ de câlisse j’ai si mal l’amitié de ta cuisse m’est vitale où es-tu mon si bel animal j’ai couru dans les rues sans te voir j’ai marché le plancher dans le noir mon reflet disparaît du miroir ne reste plus que le désespoir si la clé n’ouvre plus la maison et si je n’entends plus la raison si le chien ne comprend plus son nom conçois donc ce qu’est mon abandon rente la sringue de l’ amour dans mon cœur fais de moi le junkie du bonheur je suis seul c’est la nuit et je pleure rente la sringue de l’amour dans mon cœur
13.
Le survenant 04:34
donne-moi une bière pis un petit whisky je suis revenu de Maniwaki je te rapporte ton trombone tel que promis tu peux me remettre mon parapluie mon hostie tu te souviens de Tony celui qui chiait des olives quand il buvait trop de martinis j’ai entendu dire qu’il a mangé sa chemise et que ça lui a donné des boutons tu te souviens de la petite Manon celle qui pensait toujours un peu comme la tour de Pise il paraît qu’elle a cassé son violon quand elle a perdu la boule je lui avais pourtant dit fais attention ma fille c’est un sport dangereux les quilles je suis revenu en autobus j’ai vu que rien avait changé tout est juste un peu plus petit qu’avant les autos les appartements les plats dans les restaurants Maniwaki non plus c’est pas tellement grand là-bas comme ailleurs les nouvelles sont les dessins animés des grands enfants mais là-bas je peux pas dire le contraire je me suis refait j’ai eu le temps je vais retourner voir Lola je m’en fais pas les femmes se fatiguent toujours de leur dernier chum surtout quand il déconne sur le cholestérol en mangeant du Pablum pis je repars demain je m’en vas ailleurs quelque part c’est un secret je te le dis pas je vas t’écrire fie-toi sur moi je vas t’envoyer mon nom écrit en lettres majuscules sur un deux de pique ou sur un bill de cent tu vas savoir que ça vient de moi n’importe comment en attendant donne-moi un autre verre donne-moi une bière pis un petit whisky en passant quand je serai parti dis bonjour pour moi à mon père et à ses enfants
14.
Miss Monde 02:31
elle est venue du bout du temps un collier de seins à son cou les mains en forme d’ouvertures et le sourire du thé fumant vêtue de la noire chevelure sans armure sans frivolité venue de la fin de la terre là où les oiseaux virent de bord avec des lèvres en abondance des pieds en nombre suffisant les yeux bridés comme des martyres la lune pleine entre ses jambes c’est l’écuyère sous le cheval la cavalière armée d’amour elle est venue de toutes ses forces portant son dos comme un lit blanc ses ailes comme des sentinelles et la brume du soleil levant venue de l’intranquillité fuyant la fuite et pour rester
15.
nous n’aimons franchement que ce qui nous plaît je parle bien sûr des anges dont sont pleines vos poubelles notre politique est indiscutablement érotique notre programme est la beauté même cette finalité sans fin celle que tu as camarade peut-être oubliée un matin ou qui t’est restée entre les mains au fil du temps à force de repasser par le même en ce qui nous concerne nous n’avons plus d’idées nous n’avons que des mots dont tu n’as pas idée nous sommes les gardiens de l’inutile la forteresse que nous défendons restera imprenable à jamais parce qu’elle est vide – tu le savais ? nous ne savons pas compter nous ne rêvons que de raconter nos voix sont des masques et nos tréteaux sont paraît-il si beaux que quelqu’un m’a dit que les vieux chevaux viennent mourir de ce côté-ci de nos eaux et qu’entre nos mains le plus noir des oiseaux sera toujours plus blanc que le bas de ton dos ne vois-tu rien venir camarade sur le trottoir pourtant le vieux soulier noir ressemble à s’y méprendre à un corbeau noir c’est en nous nous le savons que le siècle se survivra nous entrerons dans un autre millénaire en marchant sur les mains et le cul à l’air – comme dans l’au-delà le temps ne nous est rien que le souffle de la mode agonisant dans les couloirs d’un métro là où nous avons trouvé ces lambeaux d’âme dans lesquels nous avons taillé nos manteaux tout ce qui nous alarme a été créé pour notre bien et fera désormais notre charme et nous nous en repaîtrons et nous nous en foutrons plein les babines et nous rirons bien ronds en nous roulant dans le sublime ne vois-tu rien venir camarade sur le trottoir pourtant le vieux soulier noir ressemble à s’y méprendre à un corbeau noir
16.
toutes les musiques sont inutiles ou presque parce que la musique est faite en général par des musiciens / les musiciens sont des gens qui n’ont rien à dire mais qui veulent faire quoi de la musique / un batteur veut taper sur ses casseroles il se fout bien de tout le reste / une symphonie c’est un gros tas de notes qui tiennent ensemble à cause de quelques lois strictement mathématiques et qui n’expriment rien d’autre qu’une architecture mathématique / on l’a dit souvent il n’y a pas d’émotion dans la musique de Bach par exemple pas d’idées non plus sauf des idées de mathématique musicale / pour que la musique devienne intéressante il faut lui superposer du texte c’est-à-dire du sens ce que la musique toute seule ne fournit jamais puisqu’elle en est incapable / le chant grégorien va quelque part il est prière une sonate pour piano n’est que du piano ivre d’une combinatoire mathématique / la musique populaire elle est une arnaque à vagins une pulsion simiesque et une colossale machine à piastres on commence à le savoir / ce n’est pas pour rien que toutes les « idoles » sont manufacturées pour un public d’adolescentes de plus en plus jeunes ça carbure aux hormones et c’est jetable quinze mois plus tard / la « grande musique » ressemble à la passion des nombres qu’avait Sade elle donne le même vertige et elle est aussi platement vide / quand on sait ce que c’est qu’un accord mineur il devient vraiment trop facile de peser sur le piton même si ça marche à tout coup et justement parce que ça marche à tout coup / Beethoven disait un jour à un violoniste récalcitrant qui n’arrivait pas à jouer une partition trop difficile « Que m’importe votre sacré violon quand l’esprit souffle en moi ! » / il écrivait de la musique le zeb il s’était fasciné sur la mathématique et personne n’allait le faire chier n’est-ce pas / la musique de son époque commençait à souffrir de la mort de Dieu qu’elle pressentait ou qu’elle avait anticipée cette époque celle du « romantisme » / aujourd’hui la musique est morte la grande musique d’abord merci au matraquage de masse des faiseurs d’hymnes aux vagins la musique religieuse n’en parlons pas mais plus grave la musique populaire aussi / il y a une énorme différence entre une culture populaire et une culture de masse / Robert Johnson a écrit des blues issus d’une culture populaire Eric Clapton le long saxon aux pieds froids n’est qu’un faiseur de sonorités très suitable pour un marché de masse qui ne connaît pas et par conséquent n’achète pas la musique du nègre mort Johnson / l’architecture du chant grégorien obéit à un principe mathématique visant à produire une mélodie dépourvue d’excitation sensuelle la spiritualité s’opposant dans la religion chrétienne à l’univers trouble de la sensualité les écarts entre les notes sont soumis à un contrôle d’une extrême rigueur qui ne permet aucun emballement aucune envolée aucun déraillement émotif / évidemment cette musique est la plus sensuelle du monde la plus blues la plus magnifiquement retenue et la plus suavement suggestive de ce qu’elle veut suggérer le divin lancinant et qui fait mal quand on le cherche en pure perte toujours à l’intérieur de soi / j’ai craqué pour le rap à l’époque déjà oubliée où il a été ce que la musique « afro-américaine » a toujours été / depuis que les Italiens et les Chinois font du rap rococo avec des tuques de nègre c’est la nausée naturellement / l’intelligence du slang de l’« ebony » mettons des nègres américains qui ont inventé le rap est égale à celle qui a donné naissance aux phrasés jazz blues rythm & blues funk rock ’n’ roll brevet nègre ne l’oublions pas / ils ont tout fait / la seule musique « typiquement » américaine est le country & western qui est une musique européenne resucée en gros / j’admire cette vraie culture populaire dont est issu le rap qui est devenu une autre vis de la culture de masse et qui pour ça ne veut plus rien dire aujourd’hui / la parole est l’essence du rap le reste sans la parole ne serait rien / nous sommes des êtres beaucoup trop sophistiqués pour être victimes de la savane et de ses seuls rythmes nous sommes des singes dénaturés le but de notre culture est de faire de nous des primates dégénérés des blondes à l’aisselle rasée qui ne parviennent jamais tout à fait à entrer en transe quand bat le tam-tam entravé par la pénicilline pourtant fabriquée à partir du membre de l’étalon / il y aurait une vaste étude sociologique philosophique religieuse qui devrait être entreprise afin d’étudier le vide estomaquant des pages de journaux et de magazines consacrées aux entrevues universellement stupides que donnent les « musiciens » et autres chanteurs de pomme promotion oblige / dans toutes les musiques où on n’entend que l’absence de Dieu ou l’absence de son absence on ne peut sentir que cette horreur les pieds du cœur humain qui pue comme tout ce qui vit et qui va mourir / la musique seule c’est deux choses rythme et mélodie l’accent étant mis soit sur le rythme soit sur la mélodie une « belle » mélodie pour être belle doit être lente un rythme emportant doit être rapide et forcément réduire l’aspect mélodique de la chose c’est mathématique / il faut du texte pour sauver la musique de la musique qui n’est jamais qu’elle-même trois quatre etc.

credits

released June 24, 2018

Instruments & voix : Serge Viau
Paroles & musiques : Serge Viau
Production : Visage Pâle

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Serge Viau Montréal, Québec

Serge Viau est musicien et écrivain. Il est né à Montréal, où il vit et travaille.

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